IA génératives : c'est mon choix !
Michel Diaz
directeur de la rédaction
e-learning letter
Trois ans après l’irruption des modèles génératifs, le décor a changé. L’idée d’un acteur unique écrasant tout a disparu. Le marché s’est ouvert, les offres se sont durcies, les positions se sont déplacées. Pour les directions L&D, l'heure du choix approche. Soulagement.

Le marché se pluralise : des IA qui ne jouent plus sur le même terrain

Le monopole implicite s’est effacé. OpenAI garde l’avantage de la vitesse : un texte surgit, une variante suit, un support s’esquisse en quelques secondes. Pour un concepteur, c’est l’outil qui met en route, qui débloque un storyboard, qui fournit l’amorce d’un module interactif.

Gemini (Google) agit dans un autre espace. L’IA travaille au cœur de Google Workspace, dans les documents où l’on écrit, dans les slides que l’on ajuste, dans les mails où l’on sollicite un expert. Pour les L&D déjà ancrés dans cet écosystème, l’usage est immédiat : pas d’API, pas d’adaptation, pas d’apprentissage.

Claude, lui, ne joue pas l’effet de vitesse : il impose la cohérence. Un raisonnement qui tient, une explication qui ne s’effiloche pas, un scénario qui ne part pas en travers. Pour les contenus sensibles, cette tenue est précieuse.

Les modèles open source ferment la marche ; ils apportent un atout que les autres n’offrent pas : une IA entraînée sur les documents internes, verrouillée sur les pratiques maison, fidèle aux référentiels.

Des bénéfices nets pour les L&D : produire, coopérer, contrôler, sécuriser

Précisons :

OpenAI sert donc à avancer, vite. Le concepteur pédagogique multimédia y trouve un gain immédiat : synopsis d’un module, déclinaison de scènes, structure d’un parcours, suggestions d’interactions, variantes de dialogues, scripts pour capsules vidéo. Ce n’est pas de la magie : c’est du temps économisé, souvent des heures.

Gemini fluidifie la production collective : un document partagé se réécrit en direct, un support se nettoie en quelques secondes, un retour d’expert s’intègre sans perdre le fil. Pour les L&D, c’est le travail réel qui s’accélère, celui qui se joue dans les fichiers que l’on retouche à plusieurs mains.

Claude consolide les contenus qui ne supportent pas l’approximation. Une grille d’évaluation, un cas sensible, une mise en situation risquée prennent forme avec une constance qui limite les va-et-vient. Les modèles open source garantissent autre chose : la maîtrise. La donnée interne ne sort pas, le vocabulaire métier est exact, l’IA reflète les contraintes de l’entreprise et non celles d’un modèle généraliste.

L'illusion persistante d'un seul outil pour tous les métiers formation…

Les discours simplificateurs trompent. Aucun modèle ne couvre, seul, tout ce que la formation exige. Le concepteur travaille différemment du formateur. Le responsable formation n’a pas les mêmes besoins que le tuteur. L’administrateur LMS cherche autre chose que l’ingénieur pédagogique. Le concepteur pédagogique multimédia, par exemple, jongle entre écriture, scénarisation, motion design, interactions, voix off, cohérence narrative. OpenAI lui sert d’accélérateur, mais Gemini l’aide dans les allers-retours avec les experts, tandis que Claude renforce les passages à risques. Quant aux modèles open source, ils l’aident à insérer dans ses modules des formulations strictement alignées sur les référentiels internes. Chercher un outil unique ralentit tout. Associer les modèles accélère tout. Illusion persistante, déjà mille fois constatées (par exemple dans le domaine LMS), que l'on pourrait disposer d'un outil à tout faire (one-size-fits-all), sorte de couteau suisse de l'IT formation. 

Mais une convergence rapide est en cours

En matière de périmètre fonctionnel, chaque acteur avance sur le terrain de l’autre. ChatGPT ajoute un mode collaboratif qui permet de travailler à plusieurs sur une même session, d’affiner un support, de resserrer un module sans exporter ni dupliquer. L’outil glisse directement dans le travail collectif, jusqu’ici réservé à Google Workspace. Google, de son côté, muscle ses capacités génératives. Claude renforce la structuration avancée. Les modèles open source élargissent leurs extensions. Le marché s’aligne par imitation rapide. La différence ne tient plus dans la liste des fonctionnalités, mais dans l’expérience de production : là où les supports se construisent, là où l’on réécrit, là où l’on assemble. On notera également que les UX se finissent par se ressembler, comme si l'interface IA était en passe d'universalisation. 

Les DSI arbitrent : l’intégration d’abord

Du côté des DSI, un constat revient : l’intégration l’emporte. Gemini part avec un avantage clair (au moins pour les organisations qui ont opté pour l'environnement Google) : zéro friction, zéro couche supplémentaire, une continuité immédiate dans Workspace. OpenAI conserve un rôle fort grâce à son API, capable d’alimenter un moteur interne, un LMS, un back-office documentaire. Claude attire les organisations manipulant des contenus sensibles, pour lesquelles une explication stable vaut mieux qu’un effet de brillance. Les modèles open source intéressent les structures soumises à régulation ou disposant d’un patrimoine documentaire massif. Chaque option a son terrain. L’intérêt, pour les L&D, est de s’appuyer sur ces préférences techniques pour choisir l’outil le plus efficace dans leur environnement.