De la journée à l’action de formation
Baisse tendancielle de la durée des formations depuis des décennies… L’apparition du « micro-learning » disqualifie la notion même « d’heure de formation », qui continue pourtant de hanter les pratiques et les systèmes d’information utilisés par le secteur de la formation…
On a longtemps compté, on compte encore en journées de formation. Organismes de formation, responsables de formation y trouvant… leur compte.

Les premiers, parce qu’ils ne peuvent amortir leurs frais, et a fortiori réaliser des profits (de plus en plus maigres, il est vrai) qu’à condition de facturer le temps de leurs formateurs par journée au moins. Si cette unité passait (par exemple) à une demi-journée, ils devraient trouver d’autres affaires pour facturer la demi-journée restante. Double effort commercial, pour amortir le salaire du formateur. Multiplier annuellement par 130 à 150 journées de facturation, puis par le nombre de formateurs… Une gageure ! On ne s’étonnera pas que la demi-journée soit absente des principaux catalogues de formation, malgré la tendance lourde à la réduction des durées de stage.

Des durées courtes plébiscitées

Les responsables de formation y trouvent aussi leur compte. Ces durées sont plus faciles à gérer : les SI formation ont été bâtis sur ce minimum d’une journée, et les OPCA ne reconnaissent que cette unité ; aussi les offres des organismes de formation sont plus simples à comparer… Problème : ces durées auxquelles les métiers et les apprenants étaient habitués passent moins bien à présent que les équipes sont en sous-effectif et que les salariés ont goûté aux attraits du Web.

On objectera que l’heure de formation a droit de cité de longue date notamment dans le cadre de certaines obligations déclaratives. Mais cette heure-là n’est qu’une simple division, a posteriori et à usage essentiellement statistique, d’une journée de formation ; laquelle reste la principale unité opérationnelle de conception et de déploiement de la formation.

15 à 20 minutes pour un module de e-learning

Le e-learning bouscule ce vieil édifice. Car il ne s’embarrasse pas de ces formats : la durée moyenne d’un module ne dépasse guère aujourd’hui 15 à 20 mn – aussi brève soit-elle, l’heure de formation elle-même n’est plus adaptée au chiffrage de ce nouveau monde… Confère l’invraisemblable appareillage qu’il faut actionner pour agréger ces bouts d’heures de formation dont on a du mal à démêler les inextricables liens au flux du travail.

Conséquence : la difficulté qu’ont certains responsables de formation à justifier des investissements e-learning auprès de leur direction, alors qu’ils souhaitent par ailleurs maintenir le nombre d’heures de formation par salarié et par an comme principale mesure de l’importance donnée à la formation et au développement des salariés dans leur entreprise. Qu’on transfère une partie des heures du présentiel au e-learning ne change évidemment rien au coût de la formation ! Une heure de salaire chargé coûtant toujours une heure, on manque l’objectif d’optimiser les budgets de formation.

Une sérieuse raison de remplacer cette vieille lune, l’heure de formation, par la notion d’action de formation, nettement plus apte à décrire la formation comme elle va ou finira par aller. Action de formation : suivi d’un micro learning, lecture d’une note technique, participation à un fil de discussion sur le réseau social, à une réunion, à un stage (pourquoi pas ?), etc. Principe : des dizaines d’actions de formation et d’apprentissage, qui épousent étroitement les besoins en situation de travail, et viennent se substituer à l’événement « stage », souvent encore la seule action de formation annuelle accessible… à 42% seulement des salariés !

Tribune initialement parue dans Formaguide sous la signature de Michel Diaz