Enjeux et problématiques juridiques du e-learning dans les entreprises…
Une intervention remarquée de Sarah Lenoir, avocate au cabinet Alain Bensoussan, lors des dernières Rencontres du e-learning et de la formation mixte… Mieux vaut prévenir que guérir…
Maître Lenoir aura beaucoup insisté sur la protection du e-learning par le droit d'auteur… A juste titre, car il semble que les entreprises fassent trop souvent l'impasse sur une question susceptible d'entraîner des dommages financiers et nuire à leur réputation. Le principe a été rappelé : "Toutes les œuvres de l'esprit originales sont protégées par le droit d'auteur quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérité ou la destination"… Une formulation juridique qui embrasse large. Avec 3 conditions cumulatives : pour que l'oeuvre puisse effectivement être protégée par le droit il est nécessaire qu'elle soit qualifié d'oeuvre de l'esprit, qu'elle soit formalisée et originale… La liste des types d'oeuvres de l'esprit donnée par Maître Lenoir, ainsi que les critères de formalisation et d'originalité auront convaincu l'assemblée qu'un module e-learning en fait bel et bien partie !

Du coup, tous les éléments d'un module e-learning sont protégés : le graphisme, les photographies, animations, personnages utilisés, les sons, la musique, le schéma général… Y échappe tout de même la méthode pédagogique. Mais pas la plateforme e-learning elle-même, ce dont on pouvait se douter. Une plateforme qui bénéficie même d'une double protection, selon Maître Lenoir : à la fois comme oeuvre multimédia et comme base de données (structure y compris).

Les droits d'auteur dits "moraux" (droit de divulgation, de repentir, droit à la paternité, à l'intégrité de son œuvre) sont attachés à la personne de l'auteur, et d'une durée perpétuelle. Les autres droits dits "patrimoniaux" confirment le monopole d'exploitation pour une durée de 70 ans post mortem.

Ces droits ouvrent la porte à de multiples contestations possibles, selon le principe que "l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous"… Que le module e-learning résulte d'une commande à un fournisseur extérieur ou soit produit par un salarié de l'entreprise, il est impératif de gérer contractuellement les cessions de droit, sauf à se créer quelques soucis, car les exceptions au principe évoqué sont plutôt rares - logiciels créés par les salariés, oeuvres créées par des fonctionnaires, oeuvres plurales (collective, collaboration, oeuvres dérivées).

Pour éviter des sanctions qui peuvent être lourdes (jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende… mais ça ne s'est pas encore vu dans le e-learning…), l'entreprise doit sécuriser ses droits sur une œuvre, ce qui passe, comme l'a montré Maître Lenoir, par la conclusion de contrats - cession des droits de propriété intellectuelle ou licence sur ces droits -… et sur la protection des oeuvres par leurs auteurs à travers tout un ensemble de techniques permettant notamment de se préconstituer une preuve.

De l'importance de nouveau démontrée de disposer de bons contrats… ou d'un avocat !