L'évaluation de la formation par Jonathan Pottiez
Oeuvrant chez Formaeva, dont on a déjà eu l'occasion de dire le bien qu'on pense de ses interventions dans le domaine de l'évaluation de la formation, Jonathan Pottiez publie chez Dunod ce qu'on pourrait considérer comme la "substantifique moelle" de sa récente thèse de doctorat…

On le remercie à la fois pour l'utilité et la lisibilité de son ouvrage - une excellente somme sur les pratiques d'évaluation de la formation dans les entreprises françaises, et au-delà, et sur les nombreuses pistes qu'il trace en vue de les améliorer. On lui reprochera tout juste ses trop nombreuses références à des travaux universitaires, parfois anciens, qui ne doivent pas occulter que ces questions ont profondément changé de nature depuis une dizaine d'années… Le risque, nous l'avons souvent mentionné, étant celui d'une évaluation partant de la formation (d'une formation continuant de s'ériger en objet de sa propre évaluation, à travers ses insaisissables objets que sont les savoir, savoir-faire, savoir-être), plutôt que des résultats attendus, notamment les gains de performance individuels et collectifs, mesurables… Loin de la seule évaluation que les salariés donnent de leur satisfaction de la formation reçue.

Jonathan Pottiez ne tombe pas dans ce dernier travers, comme il le montre dans la partie de l'ouvrage consacrée aux "Principes directeurs pour évaluer ses formations", avec un rappel intéressant du débat toujours en cours entre les tenants du ROE (return on expectations, retour sur les attentes) et ceux du ROI (retour sur investissement). Il semble que notre auteur ait évolué ces deux dernières années sur la question… Encore un effort, Jonathan, et vous vous convaincrez que la formation peut et doit se doter des outils et des méthodes (statistiques comprises…) pour affronter sereinement le calcul du ROI ! Dans cette même partie, le chapitre qui traite de la démonstration de la valeur ajoutée - en particulier de la façon de bâtir une chaîne de preuves - mérite d'être médité… Au reste, "valeur ajoutée" : la connotation est bel et bien économique… On n'est décidément pas si loin du ROI.

La 3ème partie est réservée à la présentation des 4 niveaux du modèle de Kirkpatrick - lequel date tout de même d'une cinquantaine d'années… - dont l'enjeu et les bonnes pratiques de mise en application sont bien rappelées, niveau par niveau… Le 5ème niveau proposé par Phillips n'est pas étudié, peut-être dans une future mise à jour ? Immédiatement utile, sorte de boîte à outils pour les responsables formation qui voudront se lancer dans une stratégie d'évaluation plus ambitieuse, car l'ouvrage pourrait susciter des vocations… Ce que viendra compléter la lecture de la 4ème partie - "Mise en œuvre d'un système d'évaluation".

Résumons : un ouvrage pratique, point trop en avance sur son temps ni sur ce que les départements formation sont prêts à recevoir… C'est aussi sa limite, non déjà dommageable : on n'y trouve pas l'écho des disruptions en cours.

Michel Diaz